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Publié le par Môah

Quelques mots. Quelques mots et le gouffre s'est créé. Je l'ai vu s'éloigner. La terre a tremblé. Un instant il était à mes côtés et le séisme l'a écarté. Je l'ai vu s'éloigner. Regarder dans le vide, ne plus me voir. Trop blessé pour me regarder, me voir de l'autre côté. Il a tourné le dos et est parti. Au revoir. Adieu Amaury. Au revoir.
Moi je suis restée. Regarder dans le vide et vouloir s'y jeter. Me tourner vers les terres mais rester au bord. Ne pas oser regarder en arrière et vouloir y retourner. Sentir ce vide qui m'attire. Le ravin créé ne se refermera pas. Rien qu'une envie, vouloir m'y jeter.
Les yeux rivés sur l'horizon, je sens mon passé, si pesant, là bas de l'autre côté. Un gouffre à traverser. Un gouffre où je voulais tomber.
Quelques fois le désespoir prenait le dessus et je me sentais partir. Partir en arrière, et tomber. De là, ma soeur et Pierre, d'autres encore, Jon et tant d'autres, m'ont rattrapé. Comme sortis du sombre néant, anges de lumière venus me recueillir et me ramener sur terre. Combien de fois ais-je voulu tomber...
Désespoir, le gouffre sans fond m'aspirait et m'emmenait, même quand je me débattais. Il avait capturé mes sourires. Figés. Il avait capturé mes pensées et dans leur chute angoissante, les torturait.
Le temps passait et pire c'était. L'horizon couvert de chapes de brumes me masquait tout espoir. Je restais debout au bord du gouffre, tournant le dos à mes erreurs, les niant parfois par peurs. En équilibre au bord de la mort. En équilibre au bord de la vie.
La lumière vint un jour, l'aurore s'est levé, lumière dorée inondant mes pleurs. La lumière par magie perçait les nuages de brouillard. Et j'ai souris.
Petit à petit j'ai relevé la tête, petit à petit il a essuyé mes larmes. Sans le savoir.
J'avance petit à petit, m'éloignant du vide, sur la pointe des pieds, le pied hésitant. Sur la terre craquelée. J'ai peur de la briser, j'ai peur de la faire encore trembler. Je la parcours délicatement. J'avance et je continue doucement, fragile, le poids de ma douleur laissé sur le sol.
J'avance et je ne regarde plus en arrière... le vide est profond, j'aurais le vertige et je ne veux plus. Tomber. Tomber.
Retomber en arrière.
L'horizon n'est plus voilé, deux silhouettes au loin main dans la main.
Ma douleur nous regarde et me souris. Continuons : avançons.
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